INDE: Karnataka: après une semaine d’emprisonnement, douze chrétiens arrêtés pour blasphème envers la religion hindoue ont été remis en liberté sous caution

Eglises d’Asie, 15 avril 2010 – Onze pasteurs et un laïc pentecôtistes ont été relâchés lundi 12 avril, une semaine après avoir été mis en prison pour avoir « insulté » la religion hindoue et pratiqué de prétendues conversions forcées dans le district de Coorg, au Karnataka.

Le tribunal avait demandé pour leur libération une caution de 5 millions de roupies (83 000 euros), a raconté à l’agence Ucanews (1), Sajan K. Georges, président du Global Council of Indian Christians (GCIC), une ONG d’obédience protestante qui lutte contre les violences antichrétiennes. Le militant chrétien a expliqué que la libération des douze chrétiens avait été retardée parce que les Eglises pentecôtistes « n’arrivaient pas à réunir une somme aussi colossale » pour la caution. « Nous avons dû l’acheter au sens littéral du terme », a-t-il déclaré.

Les pasteurs pentecôtistes avaient été arrêtés par la police le lundi 5 avril et placés en détention sur la base d’allégations faites par des membres du groupe hindouiste radical Rashtriya Swayamsevak Sangh (RSS, Corps national des volontaires) (2). Les douze chrétiens appartiennent à différentes dénominations protestantes: l’Eglise pentecôtiste de l’Inde, l’Assemblée de Dieu, l’Agape Ministry, l’Indian Bible Translators Ministry et d’autres encore. Selon Sajan K. Georges, ils avaient participé le vendredi précédent à un grand rassemblement de prière commun.

Le 5 avril, les pasteurs pentecôtistes étaient en train de déjeuner chez un certain Vijay, un chrétien laïc, lorsque six hindous appartenant au RSS et accompagnés de trois policiers ont fait irruption dans la maison et les ont arrêtés sous l’inculpation de conversions forcées et d’autres pratiques illégales.

Le président du GCIC affirme que cette affaire ne va pas en rester là et suivra son cours en justice « jusqu’à son aboutissement », soulignant l’irrégularité de l’arrestation, basée sur de « fausses accusations » et une « intimidation criminelle ».

Les hindouistes ont accusé les pasteurs d’avoir délibérément porté atteinte aux sentiments religieux d’autrui par leurs paroles et leurs actes, et voulu outrager volontairement leur religion par des actes mal intentionnés. Ils ont affirmé que les chrétiens organisaient des réunions illégales, portaient atteinte à l’ordre public par leurs insultes et pratiquaient des conversions forcées. Enfin, alors que les pasteurs « n’avaient sur eux qu’une bible », ils les ont accusés de porter des armes.

« Dans notre système [judiciaire], n’importe qui peut déposer une plainte fondée sur de fausses accusations ». Et si la police porte l’affaire devant le tribunal, « c’est aux accusés de prouver leur innocence », dénonce Sajan K. Georges

Selon les études de son organisation, dont le siège se trouve à Bangalore, et celles d’autres associations de défense de la liberté religieuse comme le All India Christian Council (AICC), les chrétiens de l’Etat du Karnataka sont victimes d’attaques et de violences de plus en plus nombreuses depuis que le Bharatiya Janata Party (Parti du peuple indien, BJP) est arrivé au pouvoir, en mai 2009.

(1) Ucanews, 13 avril 2010; Ucanews, 9 avril 2010.

(2) Fondé en 1925, à Nagpur, par le Dr Keshav Bali Ram Hedgewar, le RSS (Rashtriya Swanamsevak Sangh, Corps national des volontaires) est, à l’origine, l’une des composantes des mouvements de libération de l’Inde. Par la suite, ce mouvement nationaliste s’est assigné comme objectif de faire de l’Inde un « hindu rashtra » (Etat hindou), à l’instar du Pakistan qui est un Etat musulman. C’est un mouvement discipliné, fortement organisé, avec de multiples programmes de formation (depuis la formation « idéologique » jusqu’à la formation physique). Il n’est jamais devenu un parti politique, mais il a puissamment contribué à la formation du parti Jang Sangh d’abord, puis du BJP (Bharatiya Janata Party) avec lequel existent des relations d’interdépendance: le RSS soutenant le BJP tandis que celui-ci favorisait les objectifs du mouvement, devenu le fer de lance des hindous extrémistes.

(3) Voir EDA 517